Qui, lors d’un mâchon endiablé ou d’un repas entre amis, n’a pas goûté, en accompagnement d’une viande en sauce, au fameux gratin de cardons à la moelle ? 

Mais que savez-vous de ce légume ? Et, d’ailleurs, est-ce un légume ? Où et quand se cultive-t-il ? Qui sait que cynara cardunculus regroupe aussi bien le cardon… que l’artichaut ?

I) Histoire et origine géographique

La première évocation du cardon sauvage date du IVème siècle avant Jésus-Christ, sous la plume de Théophraste.

Le philosophe grec mentionnait la consommation par les Grecs du kaktos. Egalement présent sous la plume de Pline l’Ancien sous le nom de Carduus et dans l’antique livre culinaire De re coquinaria, le cardon était apprécié des Romains et cultivé en Sicile ou à Carthage.

Le terme cardon provient de l’occitan cardo et, avant lui, du bas latin signifiant chardon. Attesté dès le XIIIème siècle, la « cardonette », la fleur du cardon sauvage, servait à cailler le lait.

La plante, dès 1566, trouve à Genève un solide ancrage, peut-être assis par l’arrivée des huguenots après 1685.
A la Renaissance, Olivier de Serres localise à Lyon et dans le Dauphiné la région du cardon et les bienfaits culinaires du légume ne seront plus jamais niés.

Et c’est le grand nomenclateur Linné qui nomme le premier cette espèce, en 1753, Cynara cardunculus, de son petit nom actuel.

Le cardon sauvage est donc originaire du bassin méditerranéen :
– des îles Canaries
– d’Afrique du Nord (du Maroc à la Libye)
– d’Europe méridionale et atlantique (Grèce, Italie, ex-Yougoslavie, France, Portugal, Espagne)
– et d’Asie mineure (Turquie et Chypre).
Il se développe dans des milieux chauds et secs et de basses altitudes.
Le cardon cultivé s’est installé, par la suite, un peu partout ailleurs, même s’il est considéré comme plante invasive aux Etats-Unis, au Mexique, en Australie ou en Argentine.

II) Description du cardon

A proprement parler, cynara cardunculus est un ensemble de plantes herbacées bisannuelles de la familles des Astéracées – à vos souhaits, bien sûr – qui comprend :
– l’artichaut cultivé, pour sa tête
– le cardon sauvage
– le cardon cultivé, en tant que plante potagère, pour ses côtes épaisses, consommées comme légume.

La plante se développe d’abord en rosettes.

Puis elle émet une une tige épaisse et rameuse, longue parfois de deux mètres de hauteur.
Cette tige principale s’orne de très grandes feuilles, terminées en lobes aigus, profondément marqués, de couleur gris argenté.


Les tiges secondaires, les pétioles, sont larges et charnues et constituent la partie comestible des côtes de cardons.

Les fleurs, bleu violacé, réunies en capitules, apparaissent à partir de la deuxième année et témoignent de l’appartenance du cardon à la grande famille des chardons.

Le cardon comprend plusieurs variétés différentes : 
– le Blanc amélioré
– le plein Blanc amélioré

– le Vert de Vaulx-en-Velin, bien évidemment considéré par les Vaudais et, plus largement par l’ensemble des Lyonnais, comme le meilleur du légume

– le Rouge d’Alger

– l’Epineux argenté de Plainpalais, seule espèce cultivée dans le canton de Genève où il bénéficie d’une AOP.

III) Utilisation du cardon

C’est un légume de faible importance économique, même si sa graine, très oléagineuse, est perçue comme une source potentielle de biodiesel dans certains pays de l’hémisphère sud ou s’il sert de matière première à la fabrication de plastique bio dans la première bio raffinerie du monde.

Reste donc la valeur culinaire du cardon : très fin, il a une saveur proche, à la fois, de l’artichaut, du salsifis et du céleri et se cuisine au jus, avec du beurre ou de la crème, en gratin avec de la béchamel ou en soupe.

Son goût recherché s’allie à de multiples bienfaits pour la santé :
– la cynarine qu’il contient est un épurateur du foie
– il est très peu calorique
– il est riche en fibres et facilite donc la régulation du transit intestinal
– il a une teneur importante en minéraux et oligo-éléments, magnésium, calcium, fer, sélénium, zinc et surtout potassium, pour lutter contre la tension artérielle
– il a des vertus antioxydantes
– il contient de l’inuline qui est un glucide assimilable par les diabétiques.

Les cardons se sèment au printemps.
Les cardes sont ensuite récoltées à partir de fin septembre, mais, avant la consommation, il faut faire blanchir les feuilles pour en ôter l’amertume, pendant quatre à six semaines.
Le cardon est donc un légume d’hiver qui se déguste de la fin du mois de novembre jusqu’au mois de mars.
Une fois achetées, les cardes se conservent une à deux semaines au réfrigérateur ou à la chambre froide.

Et si vous avez consciencieusement respecté ces quelques recommandations, vous pourrez peut-être vous délecter du divin gratin, pourquoi pas accompagné de tendres joues de boeuf cuites à la bière.

Bon appétit et large soif !